Après un début de saison sur terre battue archi-dominé par Rafael Nadal et marqué par l’effondrement du Top 10 en même temps que le retour au premier plan des « autres » Espagnols, le Master 1000 de Madrid a apporté son lot de confirmations (Nadal, Ferrer), de satisfactions (Federer, Gulbis), mais aussi déceptions (Verdasco, Moya) avant Roland-Garros.
Avant de nous lancer dans les « tops », soulignons rapidement le retour de forme d’Andy Murray qui a atteint les quarts de finale à Madrid. Néanmoins, si son parcours est correct, il est finalement équivalent à l’année dernière et il semble peu probable, aux yeux de l’auteur de ces lignes, que l’Ecossais ait un rôle important à jouer à Roland-Garros. Tout au plus peut-il viser un quart de finale. Ce sera surtout sur gazon que Murray sera dangereux, au même titre d’ailleurs qu’Andy Roddick, qui n’a pas joué un seul des trois Masters 1000 sur terre.
Les tops
Rafael Nadal. Avec 18 Masters 1000 au compteur à seulement 23 ans, Nadal bat le record « officiel » d’Andre Agassi et entre un peu plus dans la légende. Il a réussi pour la première fois le triplé Monte-Carlo / Rome / Madrid, réalisant en quelque sorte un grand chelem ocre des Masters 1000. En gagnant à Madrid, il impose un peu plus sa suprématie sur terre battue : quelque soit l’altitude, le roi c’est lui ! Par ailleurs, Nadal qui n’avait plus battu un Top 10 (excepté Tsonga) depuis un an remporte la finale contre le numéro 1 mondial et tenant du titre 6-4 7-6, ce qui ne peut que faire du bien pour sa confiance.
Et pourtant… Et pourtant on le dit moins impérial qu’en d’autres temps. Ses victoires contre Dolgopolov, Isner et Almagro n’ont pas entièrement convaincu. Contre Federer il a semblé fébrile. Il faut cependant rappeler que Nadal n’a jamais été ultra dominateur durant la saison de Masters 1000 sur terre, pas même en 2008 ou il lui fallu trois sets pour battre Djokovic puis Federer à Hambourg. Par ailleurs, étant donné l’état du Top 10 actuellement, avec del Potro et Davydenko forfaits, Djokovic alité et Söderling irrégulier, il n’aura pas forcément l’obligation d’être au top pour gagner à Paris. A moins que Federer…
On observe aussi que Nadal, qui avait fait d’énormes efforts pour être compétitif sur gazon et surtout sur dur, semble être revenu aux fondamentaux de son jeu, tout particulièrement sur son lift de coup droit. Si cette stratégie a porté ses fruits sur terre, l’efficacité de son jeu sur les autres surfaces demande confirmation.
Roger Federer. Il était temps : Roland-Garros, c’est dans une semaine seulement ! Après une période post-Open d’Australie pourrie, le Suisse retrouve la forme au meilleur moment. Une petite mise en jambe contre Becker, une montée en puissance contre Wawrinka, un excellent match contre Gulbis où son niveau a parfois touché à l’exceptionnel durant le second set, une rencontre bien maîtrisée contre Ferrer, le terrien en forme du moment, et une finale contre Nadal. Une rencontre où Federer a fait preuve d’un revers très solide, ce qui rend moins efficace le pilonnage systématique du Majorquin dessus. Le Suisse nous a aussi distillé quelques amorties qui rappellent celles de l’année dernière. Son service est (presque) au point. Mais en revanche, son coup droit manque singulièrement d’explosivité et sa volée est à parfaire. Quoiqu’il en soit, ce tournoi aura permis à Federer de refaire sa confiance à l’approche de Paris et d’envoyer un signal à tout le circuit : « Je suis là, si vous voulez le titre, il faudra aller le chercher ! »
David Ferrer. L’Espagnol a confirmé son regain de forme constaté depuis le début de cette saison de terre battue. Après ses demies à Monte-Carlo et Barcelone puis sa finale à Rome, il a de nouveau atteint le dernier carré cette semaine. Il a pourtant dû se dépêtrer d’une situation difficile contre son tombeur de l’Open d’Australie Marcos Baghdatis au deuxième tour lors d’un match remporté laborieusement 1-6 6-3 7-5 après avoir sauvé avec brio une balle de match. Une fois Čilić écrasé puis Murray bien maîtrisé, Ferrer a rejoint Federer en demi-finale, contre qui il s’est incliné en trois sets. Une défaite qui confirme le fait observé depuis des années : à l’exception de Nadal, aucun spécialiste de la terre battue n’a jamais pu réellement s’imposer sur cette surface. La faute au Manacori, bien sûr, mais pas seulement. Le Suisse était certes bon samedi, mais pas imprenable. Surtout que le Bâlois ne semble jamais particulièrement à l’aise contre les terriens pur jus, contrairement à son rival majorquin qui les passe tous à la moulinette. Le cas Ferrer est donc révélateur : le retour en force des terriens à Madrid et à Rome semble plus dû aux difficultés des grands leaders du Top 10 au début de la saison sur terre (Federer, Djokovic, del Potro) qu’à un véritable bouleversement du rapport de force sur la surface.
Ernests Gulbis. Depuis le tournoi de Rome où il avait battu Federer puis pris un set à Nadal, Gulbis semble avoir pris une nouvelle dimension. Après trois matchs bien maîtrisés, le Letton de 21 ans a livré une très belle prestation en quarts de finale contre Federer, enchaînant les coups gagnants et multipliant les amorties gagnantes lors du premier set, le tout avec un service impeccable. Après un nouveau break au tout début du second set, Gulbis a néanmoins encaissé six jeux de rang, puis a dû céder à nouveau lors de la troisième manche. Malgré tout, il a montré que son tournoi de Rome n’était pas un simple coup d’éclat, et arrivera avec le statut de tête de série à Roland-Garros. Il est très clairement « le » joueur qui peut causer la surprise contre un Top 10 en seizièmes ou en huitièmes de finale. Il faudra néanmoins voir sa capacité à tenir les matches en trois sets gagnants et à gérer mentalement son nouveau statut.
Nicolas Almagro. Le natif de Murcie s’est montré très solide tout au long du tournoi, écartant le suédois Robin Söderling lors d’une prestation superbe au deuxième tour pour atteindre le dernier carré. Son premier set remporté 6-4 contre Nadal en demi-finale, où il a usé d’un jeu agressif avec des coups droits et des revers partant à 300 à l’heure a permis de bien comprendre ce qu’était un Almagro « on fire ». Cependant, comme bien des joueurs avant lui, le 35e mondial n’a pu tenir la distance et a encaissé par la suite un 6-2 6-2 sans appel. Néanmoins, ce parcours brillant à la veille de Roland-Garros peut légitimement le faire rêver à des lendemains qui chantent. Mais le mental suivra-t-il ? Les cinq balles de match ratées contre le même Nadal à Paris-Bercy restent dans la tête de votre serviteur…
Le match Federer-Gulbis. Pour l’instant LE match de cette saison de terre battue ! Un festival de coups gagnants (et quelques fautes directes aussi, mais bon…), d’amorties, de slices, de montées au filet… Un régal servi par deux joueurs offensifs, au toucher exceptionnel… et avec du suspense jusqu’au bout.
Les ramasseuses de balles. On ne développera pas, mais je ne doute pas que d’autres le feront…
Les flops
Carlos Moya. A 33 ans, l’ancien numéro 1 mondial tente depuis le début de cette année 2010 un improbable retour après ses blessures qui l’avaient contraint à l’inactivité l’année dernière. Détenteur d’une wild-card, le vainqueur de Roland-Garros 1998 a encaissé un sévère 6-0 6-2 face à Benjamin Becker et a avoué que c’était peut-être la dernière fois qu’il jouait à Madrid. L’auteur ne développera pas davantage sur ce gaucher qui joue de la main droite, Guillaume nous préparant un de ces petits articles dont il a le secret à propos du futur retraité. Mais quoiqu’il en soit, on ne peut voir partir sans regret ce joueur qui rappelle les années Kuerten, où les terriens faisaient encore la loi à Roland-Garros.
Fernando Verdasco. Si Roger Federer a démontré durant ce tournoi ce qu’était le principe de la montée en puissance, Verdasco vient lui de nous inventer le nouveau concept de la descente en puissance : finale à Monte-Carlo, demi-finale à Rome, huitième de finale à Madrid contre le trentième mondial Jurgen Melzer en deux petit sets. Une performance sublime pour un joueur qui semble faire preuve d’un sens tactique approchant celui du stratège redoutable et redouté Gaël Monfils : « Je tape fort : ça sort ? Je tape encore plus fort ! » L’Espagnol semble chercher par ailleurs à nous démontrer qu’il est un excellent gestionnaire dans son calendrier, en décidant d’enchaîner cette semaine sur le tournoi de Nice, supposant sans doute que sa cheville tout juste guérie d’une blessure se portera mieux avec quelques matchs supplémentaires et que l’enchaînement Monte-Carlo / Barcelone / Rome / Madrid / Nice est une condition sine qua non pour arriver bien frais à Roland-Garros. Un stratège, qu’on vous dit !
Robin Söderling. Après son huitième de finale décevant à Rome, le tombeur de Nadal lors du dernier Roland-Garros n’a pas rassuré sur son état de forme en se faisant éliminer dès le deuxième tour par Almagro en deux sets secs. Si le Suédois ne s’est pas montré franchement mauvais lors de cette défaite qui tient plus à l’excellente prestation d’Almagro, ces défaites précoces à répétitions inquiètent de la part du septième mondial, qui avait pourtant brillamment débuté sa saison sur terre avec une finale à Barcelone après deux demi-finales à Indian Wells et Miami. Cette inconstance pourrait lui poser problème à l’heure de défendre les 1200 points de sa finale à Paris.
Le public madrilène. Que le stade soit moche, cela peut arriver. Que le court soit mal orienté avec un contraste ombre / lumière impressionnant pendant les matchs de l’après-midi, c’est gênant. Mais le public madrilène, lui, s’est tout simplement montré insupportable toute la semaine. Il est évidemment compréhensible, et même normal, que les spectateurs soutiennent les joueurs espagnols pendant leurs matchs, même si ce n’est pas une rencontre de Coupe Davis. Que le public applaudisse les fautes directes de l’adversaire, ce n’est pas le premier ni le dernier à le faire même si c’est regrettable. Mais quand on voit Marcos Baghdatis, sans doute l’un des joueurs les plus appréciés du circuit, obligé de demander au public de se calmer, on ne peut s’empêcher de ressentir un certain malaise. Et quand Melzer, après avoir battu Verdasco, se fait huer alors qu’il veut simplement saluer le public et est obligé de s’excuser de sa victoire, cela devient tout simplement scandaleux. Serena Williams avait dit après sa défaite dès le troisième tour contre Nadia Petrova que « ce n’est pas vraiment le tournoi favori des joueurs et joueuses. Personne n’est très enthousiaste à l’idée de venir jouer ici ». Certes, la cadette n’a jamais eu la défaite facile. Mais on peut légitimement se demander s’il n’y a pas quelque chose en plus… Un point positif néanmoins : la surface semble de bien meilleure qualité que l’année dernière.
Tags: terre battue
Spéciale dédicace à Quentin
« Avant ses débuts à Nice, Fernando Verdasco, décidément amateur d’arts, s’est rendu au festival de Cannes. La tête de série n°2, déjà aperçue au Metropolitan Museum à New York, apprécie toujours autant les mondanités pour se ressourcer avant un tournoi. «
vous êtes cordialement z’invités à commenter le nouvel article à la une ! merci de rester sur le sujet… les filles en ont ras le bol que roger et rafa leur volent la vedette des conversations des 15-lovers bonne lecture !
OK chef, on y va !
Ok, Antoine, merci pour l’info. Vu que tu es en contact avec Guillermo Vilas et la FFT, je suis obligé de m’incliner…
Mdr Jérôme, j’aime bien ta mauvaise foi, surtout quand tu dis que Federer aurait gagné Miami en 2004, sachant que c’était au premier tour je crois qu’il avait perdu contre Nadal. Enfin surtout je rigole parce que tu avais critiqué mon affirmation bien plus scientifique comme quoi il aurait remporté moins de GC si ceux-ci se disputaient en 2 sets gagnants, ou s’il y avait 16 têtes de série au lieu de 32.
Henri, on est tous les 2 dans les hypothèses invérifiables, avec juste une différence d’appréciation : je pense qu’il est beaucoup plus hasardeux de parier qu’un match se serait déroulé comme il s’est effectivement déroulé s’il s’était joué dans un format 2 sets gagnants au lieu de 3.